Abbatiale romane Saint-Jouin ; commune de Saint-Jouin-de-Marnes, Deux-Sèvres, 79, Poitou-Charentes, France
Plan de l'église abbatiale : longue nef de 10 travées (plus de 42m), accostée de collatéraux ; transept saillant ; choeur à abside semi-circulaire investi par un déambulatoire, sur lequel sont greffées 3 absidioles en hémicycle ; tourelle d'escalier appuyée sur le bras Sud du transept à l'Est. Choeur composé d'une courte travée droite, flanquée de bas-côtés, rattaché au transept, et claire-voie, comportant une travée droite, sensiblement plus longue, et l'hémicycle.
Frontispice : riches voussures décorées des fenêtres des longues faces latérales, portées sur colonnettes. Scansion de contreforts angulaires à glacis. Extrémités du fronton constituées par des faisceaux de contreforts-colonnes d'angle, sommés de lanternons à double étagement, octogonal. Divisions longitudinales marquées au RdC, de part et d'autre du portail principal, par une demi-colonne-contrefort engagée dans un dosseret, et qui le cède, au deuxième niveau, à 2 demi-colonnes jumelles de diamètre un peu moins fort, montant jusqu'au bandeau horizontal, agréablement décoré, qui limite cet étage. A chaque niveau, 3 percements disposés en chevrons : portail et grande baie en plein cintre au centre, arcades latérales, primitivement aveugles au RdC, mais aujourd'hui ouvertes par des portes secondaires, et auxquelles se superposent exactement les baies de l'étage, dont les gabarits sont identiques. Ornements discrets des archivoltes. Reliefs encastrés, sans surcharge, de part et d'autre de la baie principale et au-dessus des fenêtres latérales. Décoration du pignon triangulaire aérée, à double série de reliefs : Christ en majesté entouré d'anges et frise des pélerins se découpant sur de furtifs jeux d'appareil sans profondeur, simple tréssaillements de la pierre vivante sur lesquels brochent, au faîte, 2 cartouches triangulaires, intérieurement nus. Programme iconographique : Sainte-Vierge médiatrice, Constantin ?, Eglise et Samson terrassant le lion ? Saint Paul, Saint Pierre, Saint Jean l'Evangéliste, Saint Jouin ? L'Eglise, L'Annonciation, 2 paysans ? la Luxure aux seins dévorés par des serpents, Symboles évangéliques ? mutilés, animaux fabuleux, fleurons, travaux des mois (mutilés).
Chevet : Sihouette romane, jaillissant au Nord de la galerie du cloître flamboyant, altéré par la surélévation du croisillons méridional, permettant l'accès au réduit de défense. Elévation du chevet, encore accentuée par le développement plus accusé du choeur monastique, seulement entaché par l'épais arcs-boutants qui empâtent et masquent en partie le beau jet de faisceaux de contreforts-colonnes guillochés d'oves, ainsi que par l'élargissement des baies des absidioles rayonnantes, réalisé à l'époque gothique, qui engendre une discordance de profils désagréable et exagère les vides au détriment des pleins. Subsistent néanmoins de jolies arcatures basses, aux montants et voussures ouvragés, auxquelles d'autres, plus simples, répondent au-dessus des fenêtres du déambulatoire.
Clocher : carré, sur la croisée du transept, à 3 étages successivement retraités, aux ajourements de plus en plus complexes et diversifés. Sur chaque face, soubassement creusé de 2 paires de baies en plein cintre, très simples, comprises sous des arcivoltes enveloppantes. A l'étage moyen, fenêtres plus larges, groupées également 2 par 2 et dont les voussures, encadrées par les larmiers, retombent sur des colonnettes. Entre l'une et l'autre paire, petit oculus. Même principe au niveau sommital, mais avec des fenêtres plus petites et serrées de moins près par les archivoltes d'encadrement. Chaque étage couronnée par une corniche à modillons faiblement sculptés.
Transept et 1ère travée de choeur constituent la partie la plus ancienne de l'édifice. Coupole octogonale sur trompes, à faces inégales, à la croisée du transept, portée sur 4 arcades en plein cintre, toutes doublées, sur colonnes engagées, coiffées de chapiteaux traités en méplat vigoureux, avec sujets décoratifs, zoo- et anthropomorphiques alternés : évéques ou abbés, crosse en main, nombreux oiseaux superposés en 2 registres sous un damier, 2 silhouettes humaines parmi des spires et entrelacs et spires. Croisillons voûtés de berceaux en plein cintre, divisés chacun par un arc-doubleau. Chapiteaux sculptés : palmettes en faible relief, décor vairé sous des fleurons, quadrupèdes adossés, palmettes et griffons adossés. Première travée du choeur : grande et haute arcade en plein cintre, soulignée seulement d'une imposte chanfreinée à la naissance de l'arc. Paroi creusée, de chaque côté, par 2 étroites baies géminées, décentrées par rapport à la médiane du mur et plus proches du transept, enveloppées d'une archivolte en plein cintre, reçue au milieu sur une colonnette en délit surmontée d'un chapiteau. Au-dessus oculus ouvert, muré dans l'axe même de l'arcade.
Choeur : élévation tripartite par interposition d'une arcature aveugle entre les grandes arcades et les fenêtres hautes. Construction homogène, jusqu'au niveau des baies supérieures, à partir des 2 piles de section trilobée qui viennent à l'Ouest, et sans pénétration ni liaison, s'adosser à celles de la 1ère travée de choeur. Grandes arcades en plein cintre, doublées, reposant dans l'intervalle sur des supports quadrilobés, surmontés de chapiteaux sculptés de feuilles plates à faibles volutes. Entre la travée droite et la section tournante, doubleau séparatif de la voûte primitive reçu par un couple de demi-colonnes, assises elle-mêmes au niveau inférieur sur un pilastre qui vient reposer sur le tailloir du chapiteau correspondant de la pile inférieure. Voûte originelle remaniée au 13ème siècle par l'établissement d'une élégante voûte d'ogives angevines en réseau losangé et ornés de clés richement sculptés. Voûtes d'ogives à 6 branches remplaçant les culs-de-four d'origine du déambulatoire et des chapelles rayonnantes.
Nef : revoûtée d'ogives dans sa majeure partie (ogives angevines). Voûtes romanes conservées au niveau des 3 premières travées et des bas-côtés. Dévers sensible des piles et murs goutteraux des 3 premières travées. Raidissement et renforcement des murs gouttereaux, aux retombés des arcs doubleaux, par des systèmes de demi-colonnes adossés, à relais (comparable au bas-côté méridional d'Airvault). Collatéraux, élevés presqu'aussi hauts que la nef, voûtés en berceau plein cintre.
Voûtes "plantagenêt" ornées de 80 médaillons sculptés, tous historiés. Riche programme iconographique, organisé autour de grands thèmes réligieux : offrandes d'Abel et de Cain, guerrier Goliath terrassé par David, figures des Prophètes, le Christ, Jean-Baptiste, apôtres Pierre et Paul, figures d'abbés et de moines, la Vierge Marie, les Saints, ...
(extrait de : "Haut-Poitou roman" ; Raymond Oursel ; Coll. Nuit des Temps, Ed. du Zodiaque, pp. 239-273 et document de l'association "Les Amis de l'Abbatiale de saint-Jouin-de-Marnes")