Jeudi 6 mars 2014. Nubécourt (Meuse). Tombe de Raymond Poincaré, né le 20-8-1860 à Bar-le-Duc (Meuse) et mort le 15-10-1934 à Paris. Président de la République (1913-1920).
Raymond Poincaré, né le 20 août 1860 à Bar-le-Duc (Meuse) et mort le 15 octobre 1934, rue Marbeau, dans le 16e arrondissement de Paris1, est un homme d'État français. Il est le 10e président de la République française du 18 février 1913 au 18 février 1920.
Ministre à plusieurs reprises, président du Conseil des ministres puis président de la République de 1913 à 1920, Raymond Poincaré fut l'une des plus grandes figures politiques de la IIIe République. Il fut également l'un des personnages centraux de la Première Guerre mondiale, conflit durant lequel il appela « le Tigre », Georges Clemenceau, à la présidence du Conseil, en 1917.
Raymond Poincaré est le fils de Nicolas dit Antoni Poincaré (1825-1911), polytechnicien (1845), ingénieur, puis inspecteur général des Ponts et Chaussées.
Par ailleurs, il est l'arrière-petit-fils d'un député ayant exercé ses fonctions sous le règne de Louis-Philippe ; il est également le petit-fils du doyen de la faculté de médecine.
Il est enfin le cousin du mathématicien et savant Henri Poincaré.
Formé à la politique par Jules Develle dont il est, pendant dix-huit mois, directeur de cabinet au ministère de l'Agriculture en 1886, élu ensuite conseiller général du canton de Pierrefitte dans la Meuse, Poincaré se forge une réputation de républicain modéré et conciliant dès son premier mandat de député de la Meuse en 1887. Cela n'empêche pas ce fils de polytechnicien, entré avec réticence sur la scène politique, de s'y imposer rapidement.
Après des études à Nancy puis à la faculté de droit de Paris, il entre au barreau de Paris en tant que stagiaire en 1879 ; il est nommé premier secrétaire de la Conférence du barreau de Paris et devient secrétaire de Me Henry du Buit, célèbre avocat d'affaires. En 1883, il prononce un discours à l'ouverture de la Conférence des Avocats dans lequel il fait l'éloge du républicain Jules Dufaure, ancien bâtonnier et ex-président du Conseil décédé deux ans auparavant :
« S'il est à souhaiter que l'éloge d'un mort illustre éveille chez nous le désir de l'imiter, le simple récit de la vie de Dufaure contiendra, je crois, pour notre génération, un précieux exemple de travail, d'indépendance et de dignité. »
— Éloge de Dufaure à l'ouverture de la Conférence des Avocats 1883 Barreau de Paris
En 1895, il ouvre son propre cabinet, qui obtient rapidement un grand succès et détient une clientèle très prestigieuse pour les affaires de presse, les affaires littéraires — il est notamment l'avocat de l'écrivain Jules Verne — et le droit des sociétés. Poincaré a parmi ses clients les plus grandes entreprises industrielles et financières du moment.
Il entre en politique en 1887, en se faisant élire député de la Meuse ; il est alors le benjamin de l'hémicycle. En 1892, il est rapporteur de la commission des Finances, au moment du scandale de Panama, et est réélu l'année suivante.
À trente-six ans, il a déjà été trois fois ministre : de l'Instruction publique (1893), sous Dupuy, puis des Finances dans le second cabinet Dupuy, après la victoire électorale des modérés (1894-1895), et de nouveau chargé de l'Instruction publique, dans le cabinet Ribot, en 1895. Il est partisan de la laïcité mais éloigné de l'anticléricalisme radical. Il prône en effet une « école neutre », dont la vocation serait de produire de vrais patriotes. Poincaré devient alors l'un des leaders en vue des modérés, qui arborent l'étiquette « progressiste » qui a remplacé l'ancienne appellation d'« opportunisme » utilisée par Gambetta et Jules Ferry. Au fil du temps, ces « républicains progressistes » évoluent du centre gauche vers le centre droit, suivant le phénomène du sinistrisme.
En janvier 1912, il est nommé président du Conseil et forme un gouvernement de républicains modérés avec Briand aux Affaires étrangères ; Théophile Delcassé à la Marine ; Jules Pams à l'Agriculture ; Albert Lebrun aux Colonies et Léon Bourgeois au Travail et à la Prévoyance sociale.
Du 6 au 12 août 1912, il est en visite officielle en Russie dans le cadre de l'alliance franco-russe et assiste à des revues militaires.
Alors que le mandat présidentiel d'Armand Fallières touche à sa fin, Poincaré se présente comme candidat à l'élection présidentielle de janvier 1913. Le président du Conseil est en lice face au président de la Chambre, Paul Deschanel, et au président du Sénat, Antonin Dubost. Avec Clemenceau, les radicaux soutiennent Jules Pams, le ministre de l'Agriculture, une personnalité considérée comme effacée et dont la candidature vise essentiellement à contrer Poincaré.
Selon la tradition républicaine, un scrutin préparatoire a lieu pour choisir le candidat du « camp républicain » ; les « modérés » (républicains de droite) d'un côté, de l'autre les socialistes, refusent toutefois d'y participer. Au troisième tour, Pams l'emporte avec 323 voix contre 309 pour Poincaré, classé à gauche à l'époque (dreyfusard, laïc, il s'était marié civilement, puis religieusement en 1912). La discipline républicaine aurait voulu que, battu à ces primaires, il se retire, et c'est ce que lui demande une délégation conduite par Combes et Clémenceau.
Mais Poincaré refuse, sachant que lors du scrutin officiel, il serait soutenu par la droite républicaine : il se présente donc à Versailles, et est élu le 17 janvier 1913 au deuxième tour, avec 482 voix contre 296 à Pams et 69 pour le socialiste Édouard Vaillant. Clemenceau conservera une rancune tenace contre Poincaré pour n'avoir pas respecté la discipline républicaine, que lui-même respectera lors de l'élection.
Son mandat de chef de l'État va évidemment être marqué par la Première Guerre mondiale, pendant laquelle il est l'artisan de l'Union Sacrée politique et sociale, aux côtés de René Viviani, d'Aristide Briand puis de Georges Clemenceau. Avec Briand et Clemenceau, et contre Jaurès et la SFIO, il soutient la loi des trois ans, votée en juillet 1913.
Son rôle dans le déclenchement de la guerre est controversé : il aurait poussé à la fermeté la Russie lors de son voyage officiel du 13 au 23 juillet 1914 en Russie, afin de renforcer les alliances deux semaines après l'attentat de Sarajevo. Le 4 août, son message est communiqué aux Chambres par Viviani : la France « sera héroïquement défendue par tous ses fils, dont rien ne brisera devant l’ennemi, l'Union sacrée, et qui sont aujourd’hui fraternellement assemblés dans une même indignation contre l’agresseur, et dans une même foi patriotique ». Il participa à la cérémonie du transfert des cendres de Rouget de Lisle aux Invalides le 14 juillet 1915, dans lequel il prononça un discours célèbre dans lequel il explique sa vision du déclenchement de la Première Guerre mondiale.
Il n'hésite pas, parfois au péril de sa vie, à venir au front (essentiellement dans la Meuse et dans la Somme) afin de juger du moral des troupes et des populations déplacées. Il visite à plusieurs reprises la partie de l'Alsace redevenue française dès le 7 août 1914 : au Col de la Schlucht, à Thann, Masevaux, Saint-Amarin et Dannemarie entre le 11 février 1915 et le 10 avril 1916.
Fin 1917, il nomme le radical-socialiste Clemenceau, qu'il n'apprécie guère mais dont il admire la fermeté de caractère, comme président du Conseil. Son rôle devient alors plus discret, et il se plaint même, dans ses écrits, d'être mis de côté. Il conserve toutefois une certaine influence : selon l'historien Michel Winock, une certaine forme de cohabitation se met en place entre les deux hommes.
Dès 1920, alors que son mandat n'est pas achevé, il se fait élire sénateur de la Meuse. Aristide Briand ayant démissionné de la présidence du Conseil à la suite des critiques subies du fait de ses prises de position en matière de politique étrangère à la Conférence de Cannes, Poincaré accepte de redevenir président du Conseil en janvier 1922, à la demande du président de la République, Alexandre Millerand.
On le rappelle à la tête du gouvernement en 1926, devant l’ampleur de la crise financière. Il forme alors un cabinet d’union nationale, en conservant Briand aux Affaires étrangères, et en revenant à une politique d’austérité financière ; le franc Germinal est remplacé par le franc Poincaré d’une valeur cinq fois moindre, dévaluation qui se borne à entériner le change réel. Malade et fatigué, il démissionne en 1929. Sénateur, il meurt à Paris en 1934, il est inhumé à Nubécourt (Meuse), dans son département natal.
Henriette Poincaré, née Henriette Adeline Benucci le 8 mai 1858 à Passy (Seine) et morte le 19 mai 1943 à Paris, est l'épouse de Raymond Poincaré, président de la République française du 18 février 1913 au 18 février 1920.
Issue d'un milieu modeste, Henriette Benucci est la fille d'un cocher d'origine italienne, Raphaël Benucci, et de Louise Mossbauer, de « bonne famille » mais peu aisée financièrement. Née hors mariage, elle est toutefois légitimée suite à l'union de ses parents, le 14 juillet 1863.
Elle reçoit une éducation au couvent. À sa sortie de l'institution religieuse, elle épouse en premières noces, le 3 février 1883, un aventurier irlandais, Dominique Killoran (1856-1909), dont elle divorce le 30 avril 1890.
Par la suite, elle donne des cours d'italien au Sacré-Cœur, avant de se remarier, le 24 juin 1891, avec l'industriel Arthur Bazire (né à Falaise le 24 janvier 1837 et décédé le 16 mai 1892).
Devenue veuve, Henriette Bazire tient un salon à Paris, fréquenté par des intellectuels et hommes politiques, et se crée un réseau d'amis au sein de la haute société de la capitale. C'est par ce biais qu'elle rencontre Raymond Poincaré, dont elle devient rapidement la compagne à partir de 1901, avant de l'épouser civilement le 17 août 1904 à Paris dans le XVIIe arrondissement.
Le mariage religieux ne peut finalement avoir lieu que lorsque la preuve du décès de son premier mari est apportée, et il est célébré secrètement le 5 mai 1913, quelques mois après l'élection à la présidence de Raymond Poincaré, dans leur appartement du 10, rue de Babylone (VIIe arrondissement) par le recteur de l'Institut catholique de Paris, Mgr Baudrillart, ami de lycée à l'époque où Raymond Poincaré fréquentait le lycée Louis-le-Grand. Le président, pour satisfaire son électorat majoritairement catholique, arrive à obtenir dans le même temps la bénédiction du Saint Siège.
La presse qualifie Henriette Poincaré de femme sulfureuse, en raison du nombre d'hommes qui ont partagé sa vie. C'est en partie pour remonter cette image que son époux se présente à l'élection présidentielle de 1913. N'ayant pas d'enfant, le couple prend comme les siens les trois nièces d'Henriette.
Durant la Première Guerre mondiale, elle s'occupe de plusieurs œuvres caritatives de soutien au moral des troupes et des familles de mobilisés : elle établit au palais de l'Élysée des ateliers chargés de préparer des colis à destination des soldats sur le front et, à l'occasion des fêtes, des cadeaux, des friandises et des vêtements sont distribués aux enfants de poilus ou à ceux des écoles situées dans les zones occupées par l'armée française d'Alsace et de Lorraine.
Elle fait également partie des « marraines de guerre », avec, selon son époux, plus de 12 000 filleuls dans les tranchées. Elle accompagne enfin son époux dans la plupart de ses déplacements, n'hésitant pas à porter la coiffe ou le foulard traditionnel de la région visitée.
Le couple aime à se reposer dans le jardin du palais. Raymond Poincaré écrit ainsi : « Depuis quinze jours, la roseraie de l'Élysée est en pleine floraison et répand une délicieuse odeur. Le jardin est rempli d'oiseaux. »
En 1917, Henriette Poincaré est surprise dans le jardin du palais de l'Élysée par un orang-outan échappé d'un cirque qui se tenait alors au théâtre du Rond-Point voisin (une autre version veut qu'il s'agisse d'un chimpanzé échappé de son chez maître, un diplomate logeant près du palais : l'animal tente alors d'entraîner l'épouse du président de la République dans un arbre. La censure a par la suite interdit à la presse de parler de cet incident.
À la fin du mandat présidentiel, le couple souhaite acheter un hôtel particulier rue Marbeau, à Paris, Raymond Poincaré continuant à exercer diverses fonctions politiques. Pour cet achat, Henriette Poincaré doit vendre une villa qu'elle possédait à Cabourg ainsi que des parcelles de terrain en Normandie.
Raymond Poincaré disparaît le 15 octobre 1934. Henriette lui survit jusqu'en mai 1943. Tous les deux sont inhumés dans le cimetière de Nubécourt, dans la Meuse.